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Transition écologique: le passage à l'électrique suffira-t-il?

Antoine Pellion, secrétaire général à la planification écologique

Crédit photo Antoine Pellion, secrétaire général à la planification écologique

La voiture domine la mobilité des personnes. Pour s’inscrire dans la planification écologique à laquelle l’Etat travaille, elle devra devenir « plus légère, plus petites et plus sobre ».

A suivre les communications récentes des constructeurs, il n'est pas sûr cependant que cette orientation se dessine dans les catalogues. Les dernières études du ministère de la transition écologique mettent en perspective l’évolution du poids de nos autos depuis 2011, et le résultat est sans appel: le succès des SUV est là, et les véhicules électriques, vantés comme une solution, sont toujours très lourds. Si par ailleurs, Antoine Pellion parle des transports collectifs comme un des leviers de la décarbonation de nos mobilités, il n'évoque pas les services express régionaux métropolitains, ni les cars express qui devait faire l'objet d'un plan national. Quant à la motorisation des véhicules, elle relève du "niveau local" ce qui renvoie par conséquent aux seuls moyens des collectivités locales. Pas de mention d'un appel à projet pour soutenir les premiers efforts de transition vers des solutions énergétiques plus chères, pour le moment.
 

Des voitures électriques pour aller toujours plus loin...

Au 1er janvier 2023, le poids moyen est évalué à 1 260 kg, une donnée en constante augmentation depuis ces dernières années. Depuis 2012, la masse a augmenté de 4 %, soit 0,4 % en moyenne par an. Ce n’est pas nouveau, les constructeurs tentent de faire baisser le poids de leurs autos dans chaque domaine (sellerie, insonorisant, caisse…). Seulement, les équipements de confort et de sécurité annulent le plus souvent les efforts fournis.

C’est surtout l’avènement de l’électrification, et des batteries, qui pèsent lourd dans la balance. Ainsi, les véhicules hybrides rechargeables, hybrides diesel simples et électriques sont les plus lourds. Double peine puisque ce sont ceux qui augmentent le plus leur part de marché. Leur poids à vide s’établit en moyenne à respectivement 1 830, 1 670 et 1 520 kg.

La course à l’autonomie de la part des constructeurs à une incidence directe sur le poids.

Prenons un véhicule "X" de seconde génération apparue en 2022. Afin d’offrir plus 100 km d’autonomie en électrique dans sa version hybride rechargeable, le constructeur a augmenté la capacité de son accumulateur de 13,5 à 31,2 kWh. Résultat, son poids est passé de 2 030 à 2 335 kg, une augmentation loin d’être anodine, et ceci concerne nombre de modèles.

Depuis 2012, l’augmentation annuelle des hybrides rechargeables et des électriques a considérablement augmenté, de l’ordre de 1,9 % pour les premières et 2,4 % pour les secondes. C’est bien plus que la moyenne de 0,4 % du poids moyen tout véhicule confondu.
Les modèles uniquement thermiques ne sont pas à citer en exemple, mais leur prise de poids est plus raisonnable. Le poids des modèles essence (1 090 kg) croît en moyenne de 0,6 % et celui des diesel (1 360 kg) de 0,3 %.


Il n’y a que les voitures hybrides simples (1 310 kg) et celles fonctionnant au GPL (1 170 kg) qui suivent une tendance inverse : respectivement - 1 % et - 0,2 %. Le poids contredit directement ce qu'annonce, ce que souhaite le gouvernement.

« Plus légère, plus petite, plus sobre", la voiture de demain fait pourtant consensus chez ceux qui ont en tête la transition écologique. S'ils soutiennent la voiture électrique, c'est d'ailleurs à la condition qu'elle correponde à ce potrait robot de la voiture vertueuse de demain. Le but était bien évidemment la recherche de la performance, mais le gain de poids ne saurait être oublié. Seulement ce n'est pas ce qu'il se passe. 

 

La transition écologique, c'est aussi produire plus près.

Comme la planification écologique est encore, de l’aveu même de Antoine Pellion, son secrétaire général, un projet de transition et un projet industriel, ce ne sont pas moins de 2 millions de véhicules électriques qu’il s’agirait de produire en France à l’horizon 2030, et par conséquent 15% du parc qui serait ainsi « conforme » aux orientations fixées par l’Union Européenne en matière de réduction des émissions (la fin de la vente des véhicules thermiques neufs étant pour l’heure fixée à 2035).

Dans le panorama de la situation qu'a fait Antoine Pellion, il n’a pas manqué de souligner le cas des flottes d’entreprises, pour le moins à la traîne s’agissant d’un changement de motorisation. D’où la proposition de loi du député (Renaissance) Damien Adam qui a été examinée ce mardi 30 avril 2024 à l’Assemblée nationale. Un texte visant à accélérer l’électrification dans le secteur des flottes. Loin de faire l’unanimité dans l’hémicycle, il aurait le soutien du gouvernement. 

Lire: la proposition de loi https://lnkd.in/gYn8Vzka.

 

Autre secteur à la peine, les transports non urbains de voyageurs

Du côté des poids lourds, et en particulier des transports collectifs, c’est une autre histoire. Si les bus ont entamé leur transition, la profession réclame depuis des années la reconnaissance d’un mix énergétique indépassable, encore tout récemment lors du renouvellement de ses instances dirigeantes en Région Auvergne-Rhône-Alpes, une région qui a pourtant vu son président Laurent Wauquiez prendre le projet d’autocars hydrogène à bras le corps avec un investissement direct de la collectivité, ce qui n’est pas la règle dans ce secteur au contraire des transports urbains (des véhicules rétrofités aussi dans La Région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée).

Même si Antoine Pellion a reconnu l’intérêt d’une filière biométhane par exemple, des « projets » comme ceux de méthaniseurs qu’il a qualifiés de « locaux », il n’a pas pu rassurer ceux qui souhaiteraient dés à présent un soutien du gouvernement à Bruxelles dans le cadre de l’adoption d’un règlement CO2 concernant les bus et cars. « (Le projet, ndlr.) disqualifie tout ce qui n'est pas zéro émission à l’échappement. « C’est une notion faussée qui ne tient pas compte de la totalité des émissions du cycle de vie. Aujourd’hui, tout le monde s'engouffre dans le tout électrique alors que le pragmatisme voudrait qu'on utilise déjà des biocarburants, en attendant la maturité des technologies électriques. » conclut Jean Sébastien Barrault, président de la FNTV. Ambiance électrique.

Depuis que les parties prenantes ont remis leurs propositions pour une feuille de route de décarbonation, la position du gouvernement semble ne pas avoir vraiment changé. 

Les feuilles de route ont été élaborées afin d’impliquer les filières économiques dans la planification écologique et la mise en œuvre de la future SNBC-3 : en amont de l’élaboration de la SNBC-3, il a été demandé à chaque filière d’élaborer une proposition de feuille de route de décarbonation qui recense les leviers de décarbonation qu’elle privilégie, les freins à lever, les actions qu’elle se propose de mettre en place et les propositions d’évolution des politiques publiques qu’elle adresse aux pouvoirs publics pour accompagner cette transition ; elles ont été remises en mai 2023, il y a un an.

le problème ne vient pas tant d'un secteur en particulier mais de la nécessité d'atteindre un objectif global et donc des curseurs à faire bouger par secteur (*). En effet, un travail d’alignement des propositions de feuilles de route avec les orientations de la planification écologique a été effectué qui renvoie chaque secteur à des engagements au vu de ceux des autres secteurs. Pour le "bio" gaz, c'est le cas avec celui du bâtiment par exemple.  Ce travail devrait permettre en principe aux pouvoirs publics et aux filières de partager une même trajectoire de transition. Puisque l'on évoque des engagements à prendre de manière réciproque sur les moyens à mettre en œuvre par chaque partie prenante pour la déployer, il faut bien dire que l'Etat se fait attendre: où en est l'appel à projet pour les véhicules à condition même qu'il soit au niveau? où en est le plan cars express alors même qu'ils sont explicitement reconnus par Antoine Pellion dans sa proposition?

Le passage à l'électrique ne suffira pas. Il est poussé et redouté, mais il doit, dans tous les cas, s'inscrire dans une politique résolue en faveur des transports collectifs. Et comme cela ne suffira pas, il faudra aussi revoir nos comportements. Les déterminants de la mobilité comme les nomment les experts. Un des leviers sur lequel, pour le moment, on travaille assez peu. L'orientation techniciste demeure préférée; elle est rassurante. Le problème survient lorsque cela coince pour une filière, lorsque le désir d'achat de véhicules toujours plus puissants, spacieux etc. contredisent les plans tout ficelés.

 

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(*)Au titre de l’article 301 de la loi climat et résilience, au moins tous les trois ans, le Gouvernement doit rendre compte de l’avancée de ces travaux au Parlement, après l’avis du Haut Conseil pour le Climat.

La feuille de route de décarbonation de la chaîne de valeur des véhicules lourds a été présentée le 24 mai 2023. Selon cette feuille de route, le verdissement des motorisations et des carburants est le principal levier de décarbonation des véhicules lourds. Elle considère qu’il est nécessaire de s’appuyer sur un mix d’énergies décarbonées adapté aux spécificités des différentes catégories de véhicules et d’usages. Elle indique que pour chaque type de véhicule lourd, l’évolution du mix énergétique dépendra de quatre facteurs principaux : les besoins liés aux usages ; la disponibilité de l’énergie ; le déploiement d’une offre de motorisation alternative par les constructeurs et enfin les conditions économiques (coûts d’acquisition, d’exploitation,…).

Auteur

  • Eric Ritter
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